« On croit que la mort est une absence, quand elle est une présence secrète. »
Père Antonin Sertillanges
Comment définir le deuil?
Avant d’évoquer l’aide que peut apporter l’hypnose, penchons sur le sens du mot deuil.
L’étymologie du mot deuil est douleur (dolium) en latin. Mais ce mot revêt dans la langue française plusieurs aspects. Selon le robert, il renvoie à la fois :
- à la douleur, l’affliction que l’on éprouve à la mort de quelqu’un, d’un être cher, d’un proche,
- et aussi aux signes extérieurs du deuil, consacrés par l’usage.
Au niveau psychologique, le travail de deuil est le processus conscient par lequel on passe pour se « détacher » de l’objet d’attachement disparu. C’est le fruit d’un travail volontaire qui vise une guérison, la paix.
L’enjeu du deuil consiste en la transformation des liens uniques qui unissaient l’endeuillé et le défunt. Il s’agit entre autres de renoncer à un avenir commun avec la personne disparue, sans toutefois l’oublier.
A ne pas confondre avec le processus de deuil qui correspond à une dynamique naturelle et involontaire (donc inconsciente) qui commence dès le début du deuil pour aller vers une cicatrisation psychique.
Dans tous les cas, le mot deuil renvoie à la notion de perte, perte d’un être cher ou même d’un animal et dans une dimension plus large, il peut porter sur tout évènement ou transition. Le deuil fait complètement partie de notre vie, il est lié l’impermanence de la vie.
Ainsi, le deuil peut également s’appliquer à :
- sa jeunesse ou une période de sa vie
- un lieu
- une situation que l’on a pas pu réaliser, ou qui n’est plus
- une relation amicale ou amoureuse suite à une séparation (divorce, rupture…)
- une profession non réalisée
- au départ à la retraite
- une perte d’un emploi
- un objet précieux à nos yeux qui aura été perdu ou volé (à noter que l’objet est peut-être rattaché à une histoire et à une personne)
- une grossesse non aboutie
- Un jumeau perdu, une jumelle perdue
- …
Comment se remettre d'un deuil?
Face à l’impermanence de la Vie, le travail de deuil est une (sage) nécessité puisque nous passons d’un espace à l’autre notre vie durant (ex: vie de célibataire à vie de couple, enfance à l’adolescence, vie étudiante à vie active, un lieu de vie à un autre…).
Pour faciliter ce changement et ce processus, il convient de résister le moins possible. De s’abonner à ce qui est. A la réalité.
Et aussi bien entendu… aux émotions ressenties, aussi désagréables soient-elles (en particulier douleur, tristesse…). En effet, l’accueil des émotions est indispensable, car non seulement leur répression ou leur déni entraînerait un traumatisme qui s’imprime dans le corps, mais retarderait la résolution du deuil.
L’expression des émotions et leur acceptation est la clé de toute guérison. Ce travail est donc primordial. Ce n’est ni un signe de faiblesse, ni de fragilité. Il n’y a aucun risque d’effondrement non plus. Et il a été observé et démontré qu’exprimer ses émotions durant un deuil participe à améliorer sa santé physique et psychique.
Ainsi, par exemple, si la personne ne se permet pas de ressentir la colère et le ressentiment qui peuvent être vécus vis-à-vis de la vie, de l’univers, d’un tiers ou même vis-à-vis de la personne perdue, cette colère peut être transférée ou déplacée sur une autre personne ou d’autres éléments de sa vie. Si cette étape n’est pas correctement traversée, la colère peut se transformer en amertume. Idem avec la grande tristesse, l’émotion typique du deuil. Elle est très importante et doit être vécue et exprimée. Or, l’inconfort de l’entourage par rapport à la souffrance de la personne endeuillée peut avoir pour conséquence de remonter le moral de celle-ci ou pire de la pousser à « avancer » rapidement, sans tenir compte du temps nécessaire pour laisser la douleur s’exprimer. Le mieux pour l’entourage est d’avoir simplement une attitude d’écoute et d’accueil.
La résistance au processus de deuil se nourrit de la croyance que les choses, la vie, les personnes devraient se dérouler ou se comporter d’une certaine façon selon notre propre modèle du monde.
Ces exigences (plus ou moins inconscientes) vis-à -vis de la vie, des autres, de soi vont entraîner un refus ou un déni de ce qui est, càd du changement qui est en train de s’opérer.
Pourquoi faire un accompagnement avec de l'Hypnose?
Le deuil est source d’évolution car il nous invite à nous rencontrer et à rassembler les parts de nous restées (ou qui pourraient rester) bloquées dans le passé. Se montrer proactif quant à sa guérison contribue à accélérer le processus et à faire du deuil une occasion de croissance, et ce, malgré le défi qu’il représente.
Dans ce cadre, l’accompagnement avec l’hypnose peut intervenir
- si l’une des trois premières étapes décrites ci-dessous dure trop longtemps ou que l’on reste bloqué à l’une des étapes,
- et / ou si ce deuil a révélé ou ravivé des blessures, peurs, angoisse en raison du sentiment d’impuissance, de perte de contrôle de sa vie, de solitude ou d’abandon causé par le manque physique de l’être cher,
- et / ou en ca de deuil traumatique*. Les circonstances de la mort du défunt sont vécues comme brutales et inattendues. Ex accident, meurtre… (le traumatisme étant la blessure psychique provoquée par la perte, c’est l’impact qui importe, non l’évènement en tant que tel).
Le travail en hypnothérapie va faciliter l’accès à la guérison et à la paix, ainsi qu’à la libérations des émotions douloureuses. Et en complément de l’hypnose, un travail préalable pour accepter et traverser les émotions est parfois nécessaire.
Avoir fait complètement un deuil conduit à être en paix avec l’objet du deuil et à s’abandonner, renoncer aux réponses à nos questions (ex pourquoi lui, elle ? pourquoi est-ce arrivé ? pourquoi maintenant?…). Les douleurs physiques peuvent parfois disparaître également.
« Si je ne me sers pas d’un événement pour grandir, je m’en sers pour souffrir ». Roméo Cournal
Quelles sont les étapes du deuil?
Ces différentes phases identifiées du deuil ne se vivent pas forcément linéairement dans le temps puisque chaque deuil est unique. Par conséquent, il est possible d’expérimenter d’autres étapes, de revenir à des étapes déjà franchies ou de ne pas vivre certaines d’entre elles.
- La sidération, choc, déni : la perte est hors de la réalité, inimaginable. La personne n’y croit pas. C’est un véritable choc qui peut durer de quelques heures à une semaine. Le déni joue comme un amortisseur jusqu’au moment où la personne sera prête à accepter la réalité. C’est un mécanisme de protection. Mais à un moment donné, le retour à la réalité est nécessaire même si celle-ci est très douloureuse.
- La fuite ou la recherche de la personne disparue : La fuite va se caractériser par une recherche d’activités frénétiques ou adopter certains comportements afin d’oublier ou de fuir la douleur. La personne peut aussi être dans la recherche de l’autre en s’imaginant que la personne disparue est toujours là. Ex : lui parler, mettre son couvert, parler d’elle comme si elle était toujours là. Cette phase peut durer de 6 mois à un an.
- La déstructuration : durant cette étape qui apparait en général entre 6 mois et deux ans après la perte d’un être cher, la personne est revenue dans la réalité. C’est la prise de conscience que la personne disparue ou partie ne reviendra jamais. Des émotions diverses vont alors se manifester : colère, tristesse, révolte, culpabilité, chagrin…. Et de nombreux symptômes peuvent apparaître : troubles du sommeil, perte ou prise de poids, repli sur soi, découragement, fatigue, perte de confiance ou estime de soi, … Il peut arriver qu’une personne reste coincée dans certaines de ces émotions et ne parviennent pas à passer à l’étape suivante (restructuration et acceptation). Ainsi le deuil reste « bloqué » à cette étape, et ce pour plusieurs raisons : la culpabilité, la peur d’oublier l’être cher…
Cette étape est absolument nécessaire et saine, car elle permet le rétablissement du système.
La restructuration et acceptation : cette dernière étape n’est possible que si l’étape précédente a été traversée. La personne peut commencer à accepter l’idée que la réalité ne peut être changée et qu’il est temps de reconstruire sa vie. Ainsi, sans jamais oublier la personne disparue, elle va apprendre à vivre avec (sans résignation). La personne va découvrir de nouvelles ressources en elle. Peut-être aussi découvrir une dimension plus profonde de l’existence, commencer de nouveaux projets, s’ouvrir à nouveaux à d’autres personnes. Dans cette phase, il y aussi la conscience que l’Amour est toujours présent. S’ouvre alors une période de paix, la personne s’autorise à vivre sans l’autre.
Si la majorité des personnes poursuivent un processus normal du deuil, d’autres rencontrent une perturbation dans le travail de deuil, c’ est à dire un blocage dans ce cheminement naturel. Ce deuil compliqué s’écarte donc de la normalité. La souffrance est augmentée en intensité et en temps et porte atteinte à la poursuite des différentes phases de deuil ou au terme du deuil. Le deuil pathologique, lui, est caractérisé par la survenue d’une maladie physique ou mentale dans la période du deuil, comme la dépression. Le deuil n’en est pas la cause, mais le facteur déclencheur de la maladie chez un individu dont l’équilibre ne laissait pas transparaître de signes cliniques objectivables. Ainsi, la perte d’un proche a l’effet d’un raz-de-marée induisant une décompensation physique et/ou mentale de l’endeuillé, dont le fonctionnement était établi sur des fondations peu solides. Un soutien psychologique par un professionnel est alors nécessaire.
Attention, selon des psychothérapeute spécialisés dans le deuil, il est inutile de soigner un deuil avec des médicaments antidépresseurs si le deuil est normal et non pathologique. A l’inverse, le processus naturel de deuil serait perturbé, ce qui peut provoquer l’effet inverse et entraîner une vraie dépression.
Quelles sont les conséquences d'un deuil non fait ?
Un deuil non fait peut avoir pour conséquence:
- de la souffrance (différente de la douleur inhérente au deuil)
- des blocages (car une part de moi est restée coincée dans l’espace qui n’est plus comme un fantôme qui hante cet espace de vie)
- des comportements différents,
- une hypervigilance (pour éviter de revivre la charge émotionnelle de l’expérience passée),
- de l’anxiété,
- le développement d’une aliénation,
- une identification à son histoire dramatique
- une “fausse” personnalité
- le deuil non fait d’une personne conduit à la “retenir”.
Par ailleurs, l’énergie dont la personne dispose va être utilisée à gérer le conflit neuro-émotionnel. Le corps va pomper en priorité dans l’énergie de la digestion puis dans le système immunitaire pouvant entraîner à terme l’arrivée de maladies ou perturbations (au niveau endocrinien, neurologique, cardiaque,… )…Par ailleurs, les effets du deuil ont également un impact sur la mortalité qui serait particulièrement accrue les deux premières années suivant la perte et affecterait plus majoritairement les hommes.
Quelle est la durée d'un deuil?
Si le deuil est universel, la façon de le vivre est totalement unique. De nombreux facteurs vont influencer l’intensité et la durée du deuil qui est propre à chacun: les conditions de la perte (brutale, inattendue ou non…), l’âge de la personne décédée (un enfant / une personne âgée en fin de vie), la nature, la durée et la qualité de la relation, la présence d’un accompagnement ou d’un entourage ouvert et dans l’accueil, les ressources psychiques de l’endeuillé(e)…
Il est essentiel de se donner le temps de vivre chacune des étapes pour laisser la dynamique de cicatrisation psychique œuvrer.
Pour définir la durée d’un deuil lié à la perte d’un être cher, la fourchette (moyenne) large est comprise entre 6 mois et cinq ans. Pour un deuil “normal”, la durée se trouve autour de 12 mois.
Pour un deuil amoureux, on compte en moyenne 3 mois au minimum pour se sentir mieux (ne plus se laisser submerger par la vague émotionnelle) et un an pour se sentir prêt à vivre une nouvelle histoire d’amour. Certaines personnes peuvent s’investir très vite dans une nouvelle relation, “une relation pansement”, après une relation importante. Mais celle-ci a fort peu de chances de fonctionner, le deuil n’étant pas fait. Lorsque le deuil de la relation est effectué, il n’y a pas forcément disparition des sentiments.
Bien entendu, il convient de considérer ces données avec précaution puisque comme énoncé plus haut, beaucoup de facteurs entrent en jeu.
*Le traumatisme psychique est l’empreinte laissée dans le psychisme d’un sujet par un évènement particulièrement significatif pour lui. L’individu ressent une très vive atteinte affective et émotionnelle. En neurosciences, on dira qu’il y a traumatisme dès qu’il y a répression de toute ou partie de la charge émotionnelle lié à un évènement. L’impact d’un traumatisme est à la fois émotionnel et physique (s’inscrit dans le corps).
Important :
La pratique de l’hypnose ne se substitue en aucun cas à la médecine. Toute pathologie relevant de la médecine doit faire l’objet d’un suivi médical. De la même façon, aucun traitement médicamenteux ne doit être modifié ou arrêté sans avis médical.
Par ailleurs, n’étant ni médecin, ni psychiatre, ni psychologue, ni psychothérapeute, je ne pose aucun diagnostic (qui ne relève pas du champ de l’hypnose).